Le Clept contre le décrochage scolaire

Depuis dix ans, il s’affaire à réconcilier chaque année une centaine d’élèves avec un système scolaire que la plupart, jugeant ses méthodes d’apprentissage trop « infantilisantes », ont abandonné. Le Collège lycée élitaire pour tous (Clept), établissement expérimental grenoblois dédié à la réinsertion scolaire, a servi de point d’appui à un colloque national sur l’école qui s’est tenu vendredi et samedi derniers à l’IUFM de Grenoble.

Créé en novembre 2000 sous l’impulsion de l’association grenobloise La Bouture, qui lutte depuis 1996 contre le décrochage scolaire, le Clept dépend administrativement du Lycée Mounier. Situés au cœur du quartier de la Villeneuve – « un choix politique », selon ses créateurs -, ses locaux ont accueilli « plus de 800 élèves » depuis son lancement. Tous ont entre 15 et 23 ans, sont scolarisés en seconde, première, ou terminale, et peuvent justifier à leur entrée dans l’établissement d’au moins six mois d’absence du circuit scolaire. A leur sortie, le Clept peut se targuer d’un taux de réussite au baccalauréat qui se situe « entre 80 et 90 % des inscrits. »

Depuis sa création, les initiatives du genre n’ont pas cessé de germer à travers la France. Parfois avec succès, comme à Paris, Bordeaux, ou Créteil. Souvent en vain, comme à Marseille, où malgré « le soutien du recteur et un projet pédagogique fouillé », l’établissement n’a pu voir le jour. « Nous avons tenté de donner naissance à plusieurs jumeaux du Clept, mais il n’est pas aisé de trouver un rattachement administratif, explique Bernard Gerde, cofondateur du Clept et de l’association La Bouture. Les établissements ont peur d’accueillir une pomme pourrie qui va contaminer tout le panier. » Autre frein majeur à l’implantation généralisée de ce modèle d’école de réinsertion scolaire : son fonctionnement, basé uniquement sur l’implication des enseignants à tous les niveaux de la structure, déplaît aux syndicats, qui jugent qu’un succès d’envergure du Clept viendrait « déréguler le statut de l’enseignant. »

Reste que pour les professionnels de l’éducation, le visage du décrochage scolaire n’a pas évolué depuis dix ans. « L’effervescence qui a suivi la création du Clept s’est quelque peu atténuée, confirme Bernard Gerde. Même si le contexte qui entoure le décrochage scolaire a évolué, il y a toujours autant de décrocheurs et de processus de décrochage. »